Les débats, les influences grecques, chrétiennes et juives participent à la codification de la religion musulmane. Déjà codifiés, le christianisme et le judaïsme servent en quelque sorte d’exemple ou de repère aux savants musulmans pour extraire du Coran les informations nécessaires aux suiveurs de la nouvelle croyance.
N’oublions pas que parmi les premiers musulmans se trouvent des chrétiens, des juifs ayant adhéré au message du nouveau prophète Mohammed apportant ainsi leurs connaissances et leurs techniques d’analyse théologiques.
En gardant tout ce contexte en tête, il est facile d’imaginer comment l’interprétation des textes s’imprègne d’idées et de croyances déjà répandues et acceptées dans la société médiévale du 7e et 8e siècle.
Fabrique et diffusion de l’idée reçue
Revenons à la diffusion de l’idée reçue inspirée des écrits grecs attribués à Hippocrate : le manque de moralité de la femme ou l’anomalie physique provoque la difficulté de procréation.
Une fois le diagnostic posé, la recherche d’un traitement s’impose. Dès lors, la moralité de la femme devient un enjeu afin d’assurer la procréation. La femme doit devenir une « bonne femme » afin que Dieu lui accorde un enfant. La chercheuse Kueny [1]s’appuie sur des recherches de Qzwini Zakariya et Suyuti Jalal pour donner une liste non exhaustive de ce que la femme doit achever pour s’assurer la piété. [2] « Car la piété peut stimuler la main divine bien que cela ne soit pas garantie; le Coran appellerait les femmes ordinaires à tendre à la perfection à purifier leur corps autant que possible pour les préparer à la réception de ce que Dieu garde en réserve pour elles » autrement dit, un enfant.
En affirmant cela, Kueny valide de fait l’idée selon laquelle un enfant représente une récompense. Elle avance l’argument que les femmes ne procréant pas parviennent à la piété par l’absence d’enfant. C’est-à-dire dénué de toute piété, elles ne peuvent pas donner naissance, seule l’absence d’enfant les aide à parvenir à la piété.
Idées en contradiction avec le message coranique
Ces théories, aussi saugrenues soient-elles, ont imprégné les ouvrages et les esprits jusqu’à nos jours. Pourtant, ces raisonnements entrent en conflit avec l’esprit du Coran et son message sur la piété. Celle-ci est basée sur les actes et non sur la délivrance pour les femmes d’un enfant et sur la production de spermatozoïdes pour les hommes.
L’idée même de la justice divine est remise en cause par ces théories. En effet, le Divin devient injuste, dénué de toute équité puisque le jugement ou les récompenses seraient basés sur des choses sur lesquelles aucun être humain n’a le contrôle.
Cette théorie révèle une croyance en un Dieu de marchandage et non en un Dieu de miséricorde, soucieux de notre élévation spirituelle.
Selon moi, l’auteure et ceux cités par elle ne saisissent pas l’esprit du Coran et contribuent malgré eux à alimenter les conséquences néfastes sur la santé mentale et spirituelle des femmes.
©Crédit photo : Vlada Karpovich
[1] Kathryn M.Kueny, Conceiving Identities Maternity in Medieval Muslim Discourse and Practice, Suny Press,2013
[2] Ibid,Chapitre 1
Je pense que c’est une idée reçue qui malheuresement est devenue une réalité qui s’applique aussi bien aux chrétiens qu’aux musulmans. Des articles de ce genre doivent contribué à éveillée les consciences.
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