SANS ENFANT EN TURQUIE

Les principes de l’islam reposent sur la justice et la paix. Qu’en est-il dès lors que l’on évoque les femmes sans enfant ?

Quels impacts concrets ont les hadiths (propos et actes attribués au Prophète Mohammed) et les dires des musulmans dans les communautés musulmanes ?

Les musulmans, pratiquent des traditions et évoluent dans des cultures diverses. Le traitement de la femme sans enfant varie en fonction de celles-ci en adoptant cette même ligne directrice : la mise au ban de la femme sans enfant.

La Turquie constitue l’un des plus grands pays à majorité musulmans. Une anthropologue turque, Merve Demicioğlu Göknar, s’est penchée sur la question de l’infertilité et des personnes sans enfant dans ce pays[1]. Elle considère que la popularité de la FIV en Turquie dans les médias rend la situation, des femmes sans enfant, compliquée. En effet, avec la FIV, toutes les femmes devraient être mère. Étant donné que cela ne peut être le cas pour toutes les femmes, celles sans enfant sont d’autant plus isolées parce qu’elles ne correspondent pas à l’idéal féminin et à l’idéal de la société avec au cœur, la famille.

 La maternité ou l’exclusion

C’est pourquoi l’infertilité est un sujet pris très au sérieux en Turquie, la définition de la famille est très claire. La famille c’est, un couple avec des enfants : « Un enfant est le fruit de la vie » comme dit un proverbe turc. Par ailleurs d’autres proverbes ne laissent aucune chance à la femme sans enfant de trouver sa place puisque « une femme sans enfant est une femme incomplète comme un arbre sans fruit ». On pourrait donc en conclure, d’après ces deux proverbes, qu’il n’existe pas de raison de vivre sans enfant.

Les citations populaires pressent donc les couples, les femmes en particulier, à avoir des enfants. Il n’est donc pas envisageable de ne pas en avoir. La FIV devient alors LE recours absolu presque obligatoire. Or, il peut être dans les couples une source de désaccord. La recherche de Merve Demicioğlu Göknar rapporte bien les différents engendrés par cette méthode : souvent les maris ne souhaitent pas entreprendre les lourdes démarches physiques et émotionnelles requises par la FIV. Ils préfèrent la méthode naturelle et accepter leur sort. 

À travers les témoignages recueillis par l’anthropologue, on devine l’isolement social et familial. Les femmes racontent les mises à l’écart dans les belles- familles et se considèrent comme de mauvaises épouses parce qu’elles ne tombent pas enceinte.

Cet isolement augmente et revête un caractère légitime dès lors que le président[2] cite des textes religieux pour expliquer l’unique rôle de la femme : mère.

L’auto-exclusion du cercle familial et social devient alors pour certaines une option pour éviter la gêne et la douleur.

La gêne et la douleur sont pourtant bien éloignées des principes de l’islam.


[1] Merve Demircioğlu Göknar, Achieving Procreation Childlessness and IVF in Turkey, Berghahn Books, 2015

[2] En 2016 Recep Tayyip Erdogan lors d’un rassemblement le 8 mars martela la foule féminine que le rôle d’une femme est mère. Il cita le hadith « le paradis se trouve aux pieds des mères »

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