On ne va pas se mentir, dans la plupart de nos communautés musulmanes, on discute plus de longueurs de tissu, de notre image chez les non-musulmans ou d’espace entre les bras au moment de la prosternation que de réflexions sur le doute, la colère contre Dieu, le dépit, l’envie de tout lâcher, l’incompréhension.
Et je me demande si ce n’est pas justement pour ces raisons que la mention et la présence d’hommes et de femmes sans enfant dérangent. Ces personnes par leur présence, leurs histoires renvoient à nos interrogations, à nos craintes.
Par exemple, observer un couple annoncer la venue d’un enfant et puis réaliser des mois après qu’il n’y a pas de nouveau-né rend triste. Lorsque cela se répète pour le même couple que dire.
Mettre de côté ces personnes semble l’action la plus commune dans nos communautés musulmanes afin de ne plus les mentionner, de ne pas se poser de questions et ne pas réfléchir à notre rapport à Dieu.
En effet, Dieu ne donne pas satisfaction à toutes nos requêtes, à toutes nos prières aussi ferventes soient-elles. Aussi larmoyantes que puissent être formulées les demandes, les prières ; la réponse reste parfois non.
Au delà de la « patience »
On recommande alors la patience, mais la patience n’est-elle pas valable lorsque l’on sait qu’à la fin, notre vœu est exaucé ? L’adage ne prédit-il pas que « tout vient à point, qui sait attendre » ? C’est à ce moment qu’interviennent les histoires des naissances miraculeuses citées dans le Coran ou encore de célébrités accouchant après des PMA à un âge très avancé. Ces histoires rassurent peut-être plus celles et ceux qui les racontent pour soutenir l’ami (e), le membre de la famille.
C’est vrai, qui voudrait cogiter sur la façon de réagir face à quelqu’un qui a souhaité obtenir une chose et la voit s’échapper ou ne le touche jamais du doigt. A-t-on envie de se demander comment on vit le deuil de quelqu’un qu’on n’a jamais vu ? Ou comment parvenir à faire le deuil d’une vie que l’on imagine depuis petit ou petite ?
Aujourd’hui, la réponse est non, tout simplement parce que ces questions renvoient à notre for intérieur et nous ne sommes pas encore habitués en tant qu’individus et surtout en tant que communautés à y répondre.
Pour toutes ces raisons et toutes ces questions, les personnes sans enfant ont beaucoup à apporter au sein de leur communauté.
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