« Je me sens esclave de ce rôle [de mère] » « J’ai l’impression d’avoir été embauchée pour un poste qui ne me convient pas, un poste exigeant, plus exigeant que n’importe quel autre emploi sur cette Terre, car il n’y a pas moyen de démissionner ». Astrid Hurault de Ligny[1]
Je sais qu’à la lecture de ces mots des femmes musulmanes bondiront et objecteront qu’on ne peut pas tenir de tels propos. D’autres au contraire liront enfin noir sur blanc ce qu’elles ressentent sans jamais pouvoir l’exprimer.
Lorsque je lis des témoignages de femmes qui regrettent leur rôle de mère, je me dis que comme les femmes sans enfant par circonstances ou par choix leurs histoires sont tabou, réduites au silence. Ces femmes regrettant leur maternité contrainte de taire leur vécu sont elles aussi des victimes du mythe de la maternité ; une maternité parfaite en tout point, une maternité supposée rêve et destinée de toutes les femmes.
Ce mythe, encore une fois, engendre de nombreuses souffrances. La parole se libère doucement.
Seulement dans les communautés musulmanes, cela prendra du temps.
Les six points pour lesquels la parole et la détresse resteront étouffées.
- Discuter du regret maternel briserait le mythe et les discours religieux construits autour de la maternité.
- La maternité vendue comme un devoir religieux aux femmes musulmanes, l’expression d’un regret maternel par certaines ferait d’elles de mauvaises croyantes.
- Oser évoquer le regret maternel reviendrait à risquer l’incompréhension, le rejet et le jugement.
- Avoir des enfants serait un cadeau de Dieu, un cadeau auquel apparemment toutes les femmes (même des femmes du Prophète) et tous les hommes n’ont pas droit. Avec un tel argument, quelle mère s’aventurerait à parler de regret maternel ?
- Discuter du regret maternel remettrait en question l’idée que le bonheur et l’épanouissement d’une femme n’interviennent qu’avec la naissance d’un enfant.
- La discussion sur le regret maternel conduirait inévitablement à s’interroger sur le désir de conception d’un enfant, la place de l’enfant en islam et même le sujet de l’avortement (l’avortement est permis en islam dans certaines circonstances variables en fonction des écoles de pensées).
Des solutions : encourager les témoignages, restaurer les véritables enseignements islamique.
Comme vous pouvez le constater, ces six points touchent des enseignements théologiques transmis depuis des siècles. Parce que la majorité des sociétés véhicule ces idées, très peu de femmes (et d’hommes) ont osé témoigner.
Les temps changent : je me permets d’imaginer que cet article sera partagé. Je veux croire que dans des mosquées, chez des amies, dans des cabinets de psychologues, des musulmanes mères s’exprimeront et aideront les femmes sans enfant par circonstances et par choix à briser le mythe de la maternité qui cause tant de souffrances inutiles.
Pour aller plus loin
Ne pas avoir d’enfant : une punition Divine Conséquence d’une idée reçue.
Avoir des enfants : une obligation religieuse ?
© Crédit photo Pexels – Meruyert Gonullu
[1] Le regret maternel d’Astrid Hurault de Ligny, éditions Larousse
et le compte Instagram @Le_regret_maternel