C’EST LE DISCOURS AUTOUR DU CÉLIBAT QUI ENGENDRE LA SOUFFRANCE, PAS LE CÉLIBAT !

Je n’ai aucun doute sur la sincérité des prédicateurs, des théologiens ou même des psychologues musulmans qui offrent des cours, des conférences expliquant comment en finir avec le célibat. Ils désirent mettre fin aux souffrances de célibataires musulmans qui subissent cette situation.

Ils agissent par compassion et pourtant ils sont parfois à l’origine de ces souffrances et entretiennent cette douleur. Comment ? Ils fournissent le terreau de la souffrance en relayant des discours sous-entendant que le mariage avec un devoir de procréation est une obligation.

De la même manière qu’un produit marketing, le mariage est vendu comme seule source de bonheur et de foi authentique du bon musulman et de la bonne musulmane. Le statut de célibataire est décrit comme un statut générateur de souffrance, qui éloigne du bien-être et surtout de la foi.

Quel croyant ou croyante ne souhaite pas accéder au bonheur et vivre pleinement sa foi ?

Le mariage , un produit marketing

Très naturellement, des musulmans et des musulmanes s’évertuent à atteindre ce statut d’homme ou de femme marié-e de la même manière qu’un consommateur recherche par tous les moyens à obtenir le téléphone dernier cri présenté comme LE produit que tout le monde doit posséder pour vivre sereinement.

À l’instar d’un consommateur qui ne réussit pas à acquérir LE produit dernier cri, le musulman ou la musulmane célibataire convaincu-e que son bonheur et sa foi véritable passent par le mariage commence à être géné-e puis à souffrir de ne pas correspondre à la norme.

Comment ne pas souffrir de la situation puisque tout indique aux célibataires qu’ils sont de mauvais musulmans, qu’ils ne remplissent pas leur part du contrat ?

Pire on laisse entendre que leur foi est incomplète et le demeurera tant qu’ils ne seront pas mariés. Un hadith[1] attribué au Prophète Mohammed stipulerait que le mariage serait la moitié de la foi. Ce hadith vraisemblablement authentique sorti de son contexte, signifierait que la foi, c’est-à-dire la confiance que nous avons dans le Très -Haut ne serait pas véritable tant qu’un mariage n’aura pas lieu.

 Alors que se passe – t- il en cas de divorce ? Est-ce que l’on perd une part de foi, de confiance dans le Divin ? Cesse-t-on d’être musulman ? D’être croyant ? Pourtant le divorce est permis en islam !

Profils des célibataires : divers et ignorés

 Souvent, les prédicateurs, théologiens ou autres praticiens travaillant à éradiquer le célibat ne comprennent pas ou ne souhaitent pas entendre les histoires derrière le célibat.

 Des circonstances, des traditions et même des coutumes empêchent certaines personnes de se marier.

 Des études très longues suivies d’un métier très prenant comme celui des milieux médicaux rendent difficile la tâche de trouver un compagnon ou une compagne qui accepte les conditions de vie aux horaires très difficiles.

Certains célibataires sont des aidants ou des aidantes avec à charge un ou des membres de la famille porteurs de handicaps ; il n’est pas aisé de rencontrer ou trouver un ou une partenaire qui consent à se joindre à cette lourde responsabilité.

Parfois, des célibataires écoutent religieusement des prêches les enjoignant à bien choisir leur mari ou leur femme. Par conséquent, ils ou elles prennent le temps de bien sélectionner la personne compatible. Ces célibataires ne « romantisent » pas le mariage. Ils comprennent trop bien sans doute que le mariage n’est pas simple et qu’il vaut mieux trouver le ou la partenaire avec lequel on souhaite traverser des épreuves comme un parcours de FIV .

Parmi les célibataires, il y a des femmes, surtout, qui ont mis fin à des relations toxiques, elles se reconstruisent physiquement, mentalement et parfois spirituellement.

Enfin, on compte des célibataires réalistes qui perçoivent comme crucial un logement, un emploi préalable à un mariage. Dans certains cas, c’est une famille dans un pays étranger à prendre en charge qui éloigne la considération d’ un mariage, une autre  responsabilité jugée trop lourde. Certaines traditions imposent des mariages avec des coûts faramineux alors certaines personnes s’abstiennent le temps de pouvoir économiser.

Célibat produit par les communautés musulmanes

 Il existe toujours la compatibilité éthnique imposée dans certaines communautés ou familles quand bien même le ou la célibataire a trouvé chaussure à son pied hors de l’ethnie exigée.

L’infertilité sociale produite par les communautés musulmanes dans les pays où ils sont minoritaires laisse de nombreuses femmes célibataires.

Ces derniers exemples sont des sujets dont devraient se saisir les prédicateurs théologiens et autres psychologues, thérapeutes de confessions musulmanes.

Dans ce lot de profils, de nombreux célibataires ne souhaitent pas se marier et vivent parfaitement leur célibat. L’unique souffrance que certains d’entre eux connaissent c’est la culpabilité, la culpabilité de vivre heureux avec une spiritualité enrichissante et florissante alors que la société et des théologiens ne cessent de clamer qu’ils sont incomplets sans mariage.

Or, aucune culpabilité ne devrait être ressentie que le célibat représente une transition naturelle avant une vie de couple ou un état permanent. Le célibat devrait d’abord être vécu comme une chance de se découvrir, de s’épanouir sereinement. Il ne constitue pas un délit et encore moins un péché.


©Crédit Photo Andy Tyler Unsplash


[1] Paroles et gestes attribués au Prophéte Mohammed

LES PERSONNES SANS ENFANT ET LE MAUVAIS ŒIL : VICTIMES OU BOURREAUX ?

Victime ou source de mauvais œil pour les parents ? D’abord jugées victimes du mauvais œil, les femmes sans enfant (le mauvais œil se conjugue aussi au féminin !) passé un certain âge, deviennent bourreaux ; elles seraient à l’origine de supposé mauvais œil. Elles sont donc à éviter.

Dans des communautés musulmanes, concevoir des enfants constitue une obligation. Beaucoup de musulmans ont la conviction que c’est une baraka, au mieux une récompense divine. Ces mêmes personnes expliquent l’absence d’enfant par une action punitive du Divin. Ayant cela à l’esprit, la famille ou les parents d’un nouveau-né redoutent les visites d’une femme sans enfant (fse) ou d’un homme sans enfant (hse).

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SE CACHER POUR LIRE SUR LES PERSONNES SANS ENFANT

Se cacher vraiment ? Se cacher pour lire sur les hommes et les femmes sans enfant ? C’est la surprise que j’ai exprimée en lisant un article sur le site Childless by marriage (sans enfant par mariage)

Des commentaires suivant l’article ont confirmé : oui, des femmes, surtout, se cachent pour lire sur la vie des hommes et des femmes sans enfant ou assister à des évènements en ligne. Elles agissent ainsi, parce qu’elles partagent un ordinateur, elles ne veulent pas que le partenaire ou un autre membre de la famille trouve une trace de ces lectures ou parce qu’elles sont mal à l’aise.

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SANS ENFANT : LA FOI EN QUESTION

Interchangeables, les mots, foi et espoir s’emploient fréquemment dans des situations de crises « il faut garder espoir » « il faut avoir la foi ».

Pourtant ce sont deux sentiments différents. L’espoir représente l’attente de quelque chose. La foi repose sur une confiance en une personne, dans le cadre religieux une confiance en Dieu.   

Souvent en Islam, la foi est expliquée comme la certitude que tout ira bien et que tout arrive au mieux pour chacun de nous. Avoir la foi n’épargne pas pour autant d’éprouver de la tristesse, la douleur, le doute et la colère.

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PAUSE LECTURE : « SORCIERES » DE MONA CHOLLET

Ce qui m’a particulièrement interpellé dans Sorcières, la puissance invaincue des femmes ce sont les parallèles applicables à l’histoire de la femme musulmane. C’est-à-dire que l’image et le rôle attribué aujourd’hui aux musulmanes dans les discours dominants sont l’héritage d’une histoire postérieure au Prophète Mohammed. En effet, durant la période contemporaine du messager jusqu’au début de la période abbasside ( IXe siècle), la femme occupait l’espace public. Elle disparait peu à peu en faveur de la formation d’un discours politico-religieux, l’enfermant dans un rôle lié à sa constitution biologique .

Sorcières excave un passé à l’origine des idées reçues sur les femmes en particulier les femmes célibataires et les femmes sans enfant en Europe et en Amérique du Nord.

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