Peut-on concevoir des talaqs (les mots prononcés pour mettre fin à un contrat de mariage) avec le Divin ? C’est-à-dire rompre notre relation avec Lui puis renouer jusqu’à une rupture finale[1].
Dans la plupart de nos communautés musulmanes, la spiritualité reste un terrain inconnu ou même une sphère dangereuse à éviter à tout prix, préférant le domaine légal avec des agissements et des pensées strictement codifiés. Ainsi les premiers mots de cet article pourraient choquer un bon nombre, mais allons jusqu’au bout de mon raisonnement.
Raison du divorce : Relation compliquée
Nous entretenons tous en tant que croyant et parfois non-croyant une relation avec le Divin. Il y a quelques années, une personne que j’ai rencontrée à un séminaire interreligieux m’a proposé la lecture d’un recueil de poèmes écrits par des femmes et des hommes se définissant comme athée.
De très beaux poèmes ! J’ai eu l’impression qu’elles connaissaient parfaitement le Très -Haut. Dans l’un de ces poèmes, une personne raconte la perte de sa mère malade lorsqu’elle était enfant, et son divorce d’avec le Divin ce jour-là.
Ce qui m’a frappé c’est que de nombreux poèmes narraient une déception à l’origine de la rupture avec le Divin, de son rejet total. Je me suis alors dit que ces personnes avaient connu avec le Très – Haut une relation fusionnelle, passionnelle et une grande confiance en Lui.
Même si on en discute très peu, des divorces d’avec le Divin après une relation très compliquée et décevante existent dans nos communautés musulmanes. Pourquoi en serait-il autrement ? Nous sommes des êtres humains après tout !
Les relations complexes deviennent presque inévitables lorsque des années durant nos prières et nos vœux tournent autour d’une même chose : un enfant ou un partenaire ou bien les deux. Tout est rythmé et basé dessus, notre amour pour le Divin également. Rappelez-vous un amour qui repose sur un mensonge et non des moindres. (Il exaucerait tout ce que l’on veut et donne des enfants à tous sans exception à condition de bien se comporter)
Que la séparation d’avec le Divin intervienne progressivement ou brutalement (hystérectomie, divorce, veuvage, etc.) les moments de ferveur alimentés par l’espoir cèdent rapidement leur place au vide. Que croire et que prier ? Que demander alors ?
Thérapie de « couple»
Une thérapie avec un bon-ne thérapeute spirituel connaissant la réalité des hommes et des femmes sans enfant par circonstances pour renouer, sauver ou restaurer cette relation passionnelle pourrait être utile, si seulement il en existait !
Je suis persuadée que cet amour peut renaitre avec le temps. Cependant, il arrive que certaines personnes n’aient plus envie ni la force de tenter de renouer une relation avec le Divin même si parfois au plus profond d’elles-mêmes la flamme brûle toujours.
Éventuellement, dans ces moments, il peut être utile de solliciter une tierce personne qui nous porte sincèrement dans son cœur afin qu’elle prie pour ce dont on a besoin. C’est-à-dire que cette tierce personne ne prie pas pour ce que l’on veut ou ce qu’elle imagine que nous devons obtenir, mais elle invoque juste pour ce dont on a besoin à cet instant.
J’ai une amie qui organisait des cercles de femmes et elle attribuait à chacune une partenaire de prière pour la semaine. Chacune devait prier pour l’autre et demander ce dont elle avait besoin parce que disait cette amie, on ne peut jamais savoir ce dont a besoin une personne excepté le Très-Haut.
Dans le cas d’un divorce pour raison irréconciliable, je m’imagine que même « séparés » (et je l’écris parce que je suis toujours croyante) le Très – Haut sera perpétuellement aux côtés de la personne initiant le divorce.
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[1] Terme de dissolution d’un contrat de mariage. Des conditions entourent cette dissolution permettant au couple de reprendre leur relation si une réconciliation intervient.